Le sans gluten, un feu de paille ?

Aujourd’hui, selon une enquête mondiale de Nielsen sur l’alimentation, 37 % des Français excluent au moins un aliment. Pour des raisons sanitaires, éthiques ou spirituelles, en fonction de l’air du temps, des traditions religieuses ou familiales, ou encore pour les besoins des régimes médicaux, notamment des régimes sans sel, sans sucre, sans lactose, sans viande, sans huile de palme… et sans gluten ! La question se pose : le sans gluten est-il un feu de paille parmi les autres tendances alimentaires ?

Mais qu’est-ce que le gluten ?

Le blé a longtemps eu cette image d’aliment respirant la santé. D’ailleurs, sa consommation -et l’espérance de vie- ont considérablement augmenté au cours de la seconde partie du XXème siècle. Il est même devenu plus apprécié que le riz en Asie. Mais tout a changé à cause du gluten. Cette inversion de tendance est si prononcée que la consommation de blé commence à décliner.

Le gluten est principalement constitué de deux protéines insolubles dans l’eau (gliadine et gluténine). On les trouve dans les céréales comme le blé ou l’orge.

Grâce à ses propriétés, la pâte devient élastique au pétrissage ce qui lui permet de lever à la pousse (fermentation).

Où se cache le gluten ?

Le gluten se retrouve dans tous les aliments élaborés à partir de céréales de blé, comme le pain ou la bière. Mais on en retrouve aussi dans toute sorte de préparation industrielle, comme les plats cuisinés, les charcuteries reconstituées, les purées, potages, sauces ou même dans les confiseries.

Bière, farine, et autres produits sans gluten fleurissent dans les rayons des supermarchés. Pour retrouver l’élasticité perdue par l’absence du gluten, les industriels doivent adapter les recettes.
Les farines classiques sont remplacées par des céréales sans gluten comme le riz, la châtaigne ou le quinoa.

Allergique ? Intolérant ?

En réalité, seulement 1 % de la population serait allergique au gluten et serait touché par une maladie auto-immune qu’on appelle la maladie cœliaque, qui détruit l’intestin grêle en entraînant des carences et une dénutrition. Mais seul 20 % de la population a été diagnostiqué à ce jour.

En revanche, il existe un plus grand nombre de cas d’intolérance où les personnes ont des difficultés à absorber les protéines.

Qui sont les consommateurs français de sans gluten ?

Ce marché, encore qualifié de niche, est d’abord destiné aux personnes allergiques. Il fait de plus en plus d’adeptes parmi les consommateurs : 20 % de croissance par an depuis cinq ans en France.

Les acteurs du marché ont identifié quatre profils de consommateurs :

Les premiers adeptes du sans-gluten sont les personnes cœliaques, intolérantes à cette molécule et qui ne peuvent donc pas en consommer. Ils sont 600 000.
Ensuite, il y a ceux qui sont simplement sensibles, soit 6 millions de personnes.
Il y a les suiveurs de mode, 4 millions de personnes.
Et, enfin, il y a ceux qu’on appelle les « touchés par ricochets » qui vivent avec une personne intolérante ou sensible et consomment donc du sans-gluten lors de repas communs (1 million).

Le nombre estimé de consommateurs quotidiens de sans gluten est de 5 millions.

La réponse des fabricants

Les produits sans gluten à visée médicale existent depuis longtemps, avec une réputation gustative plutôt mauvaise.

Mais pour répondre aux attentes de ces nouveaux consommateurs, les industriels se lancent dans la fabrication de ces produits qui requièrent une grande exigence. Souvent, les chaînes de production doivent être entièrement dédiées et la certification de l’Association française des intolérants au gluten (Afdiag) est recommandée.

Produire du sans gluten représente un ensemble de coûts supplémentaires : des quantités plus petites, des ingrédients de substitution plus chers que la farine de blé et plus de contrôles qualité.

C’est pourquoi les industriels doivent convaincre sur la qualité de leurs produits pour dépasser l’effet de mode.

Alors, le sans gluten, un feu de paille ?

Les chiffres de ce marché de niche sont difficiles à obtenir et souvent noyés avec les autres « sans » (sans lactose, …)

Pourtant, on estime le marché 2016 à 65 millions (deux fois plus qu’en 2013) avec une croissance à deux chiffres.

L’Afdiag a répertorié en 2014 plus de 80 marques de produits dédiés, soit huit fois plus que cinq ans auparavant.

L’intolérance au gluten a bel et bien augmenté par rapport à un siècle en arrière, où on consommait de grandes quantités de pain. Mais le produit santé a fait place au produit bien-être, soutenu par des célébrités (Novak Djokovic pour la publicité par exemple).

A noter cependant que, pour l’instant, aucune étude clinique n’a réussi à démontrer que les effets bénéfiques ressentis (par les non-cœliaques) sont exclusivement liés à l’exclusion du gluten dans un régime alimentaire. Ils peuvent être dus à une meilleure alimentation en général, diversité, fibres, …

Pour finir sur une note plus positive, le développement de ce marché a au moins permis aux personnes atteintes de cette maladie cœliaque de trouver plus facilement et en plus grand nombre des produits sans gluten de meilleure facture !